D'accord. J'accepte ton analyse, en première approche.
Mais allons au fond des choses.
Le Boum, pour moi, c'est le sproulouitchkrkkrssss ramené à l'expression quintessentielle du saut ultime. Alors que le sproulouitchkrkkrssss se contente d'une reproduction onomatopéique de la chute, le boum capture la signification profonde du bruit du choc et l'enferme dans l'inifini diminutif d'une onomatopée noble car réduite à sa plus épurée expression. Tu noteras à ce propos la voyelle ou, voyelle fermée, voyelle sourde et lugubre, voyelle de chant funèbre - et la consonnante labiale qui ouvre et ferme le mot, fermant auditivement sa structure phonétique, mais se renvoyant la balle à l'infini, comme un jeu de miroir, avec de surcroît, l'attente que le m, vocalisé, traînard, laisse suspendue, hésitante, et malgré tout là, en l'air, persistante, derrière lui, comme un grommellement rêveur et chargé d'au-delà.
Mais l'efficience du mot ne tient pas seulement à sa phonie si chargée de cette tension intérieur qui inonde celui qui chût. Elle relève aussi d'un lexique résolument,
tranquillement simple - mais c'est une simplicité extrêmement ouvragée -, ce qui lui confère cette aura de quintessence.
En effet, le mot boum résonne de la tragique discordance entre la candeur, la nudité, de sa connotation inoffensive, et la lourdeur de la tragédie qu'il cache. Rien de plus fort qu'eau qui dort, nihil fortius quam aqua dormiens, on le sait. Le choix de ce mot ressortit donc d'une courtoisie sans hypocrisie, d'un respect tout superviellien aux choses insignes. C'est le choix de l'épuration par respect du drame. Le mot boum relève donc d'un parti pris esthétique audacieux, et résolument moderne. Celui d'une expression ramenée à son plus simple appareil, conceptuelle et minimaliste : le boum, c'est presque le langage html du cri, du saut, de la chute, c'est la crudité logistique du monde d'aujourd'hui, qui réduit les élèves à leur numéro de passage à l'abattoir, numéro de tirage soumis aux aléas du sort qui les jette, impartial et froid, dans la gueule de la Brute ou du Bon. C'est, dans ce mot banal, l'équation de la chute libre. C'est donc toute une métaphysique de la vie, de la mort, du destin et de Dieu, qui trouve son expression formelle dans le boum : le boum n'est pas un mot, c'est un
concept ; c'est plus qu'un concept, c'est la quatrième entité de la conscience qui ne relève pas de l'entendement avec Dieu, le moi et le monde.
Enfin le boum est l'expression subjective concentrant en elle même tout un destin tragique, alors que le sproulouitchkrkkrssss n'est au fond que la représentation sans grâce de la perception des autres ; le boum est l'expression d'un drame tout entier, vécu et mis en mot d'un point de vue profondément, essentiellement, subjectif et humain. Car, au fond, le boum, c'est aussi le dernier battement de coeur.
...
plaudite ! XD