Pascal, Préface au traité du vide
Constat de départ de Pascal : le respect dû aux Anciens en son temps est tel que « le texte d’un auteur suffit pour détruire les plus fortes raisons ». Il distingue alors deux catégories de domaines d’études pour les disciplines qui ont traits aux anciens textes : une qui dépend de la mémoire, et est purement historique : il s’agit juste de savoir ce que les auteurs ont écrits. L’autre dépend du raisonnement et a pour objet de dévoiler la vérité cachée.
Pour les premières sciences (géographie, histoire, théologie, étude des langues anciennes…), il est évident que pour savoir ce que les Anciens pensaient ou pour savoir quel mot latin était usité, il faut avoir recours à eux, puisqu’ils sont les témoins de leur temps. On a donc pas de rapport avec la véracité des propos en ce que l’on ne chercher pas à définir le vrai du faux, juste à constater ce qui se disait, se pensait à ces époques. Les auteurs font autorité et « c’est l’autorité seule qui peut nous éclairer »
Mais quant aux sciences qui traitent au raisonnement (physique, géométrie, arithmétique, médecine, architecture), « l’autorité y est inutile ; la raison seule a lieu ‘en connaître ». Pascal dit alors d’elle qu’elle « doivent être augmentées pour devenir parfaites » et que chaque époque se nourrit des époques précédentes pour être plus efficace, pensant alors un certain progrès des techniques humaines.
Pascal explicite alors la crise de son temps : alors que la théologie n’a rien à inventer puisque tout est dit avec véracité chez les anciens, les thèses nouvelles de théologie fleurissent en son temps. A contrario, la physique, qui en tant que domaine de la raison tend à être améliorée, ne connaît que peu d’avancée car dès qu’une thèse va contre les idées héritées des Anciens, on crie au scandale.
Pour Pascal, les Anciens, s’ils s’étaient bornés à « ne rien ajouter aux connaissances qu’ils avaient reçus […] ils se seraient privé eux même et leur postérité du fruit de leurs inventions ». Le comportement de ses contemporains est donc pour l’auteur français, proprement contre-nature.
Il en va même d’une question morale, Pascal disant qu’il est « injuste de traiter nos Anciens avec plus de retenue qu’ils n’ont fait ave ceux qui les ont précédés ». En effet, vouloir maintenir les humains au même niveau de connaissance reviendrait à nier la spécificité de la raison humaine, qui progresse dans le temps, comparé à l’instinct animal qui est le même depuis le début comme le montre l’exemple de la ruche des abeilles, qui est la même depuis qu’il y a des abeilles.
L’homme, contrairement à l’animal et à sa science finie, tends vers l’infini et le progrès. « Toute la suite des hommes, pendant le cours de tous les siècle, doit être considéré comme un même homme qui subsiste toujours et apprend continuellement ». Les anciens forment donc l’enfance de l’Humanité mais doivent être admirés en ce qu’ils ont réussi à tirer des conséquences scientifiques de leurs moyens limités et donc excusés de leur conclusions fausses, toujours à cause de ce manque de moyens qui peut fausser l’observation.
L’esprit scientifique doit alors suivre une volonté de vérité qui doit nécessairement passer par l’examen des thèses antiques, voire leur réfutation si nécessaire. « La vérité doit toujours avoir l’avantage, quoique nouvellement découverte ».